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Comme un air du "Guépard" ?

Peut-être ne connaissez-vous pas le cinéaste Visconti, la chaleur de sa photographie, la langueur de ses scènes, la poésie de ses dialogues... Il est certainement le réalisateur de la plupart des plus longs films du septième art. Mais quelles œuvres ! 

 

Le Guépard, adaptation du roman du prince Tomasi di Lampedusa, nous immerge dans les boudoirs de l'aristocratie sicilienne au crépuscule de sa gloire, au moment où Garibaldi conquiert le royaume de Naples, en 1860. Le spectateur assiste, impuissant et impatient, à l'agonie d'une société qui lui est étrangère et il ne reste jusqu'à la fin des deux heures de film que pour les beaux yeux d'Alain Delon, fougueux Tancrède Falconeri, les mouvements gracieux de la sublime et jeune Claudia Cardinale dans le rôle de sa fiancée, enfin pour le charisme mystique que Burt Lancaster offre au prince Fabrizio de Salina. 

 

La Sicile, les Chemises rouges assiégeant Palerme, les domaines de campagne et les voyages de poussière nous rappellent quelque peu ce monument du cinéma et de la littérature. Or lorsqu'on ouvre les premières pages du Jardin des dieux, on pénètre dans un univers moins feutré, loin des salons ronflants de décor baroque du fameux bal parlermitain qui nous angoisse, finalement, par cet immobilisme, miroir de celui de l'aristocratie de l'époque que dénonce Lampedusa lui-même dans son roman. 

J'ai choisi un tout autre point de vue que celui-ci ou celui de l'autrice Stefania Auci dans ses Lions de Sicile qui retrace la destinée d'une famille avec les ambitions d'un self-made man américain.

 

Dès les premières pages, le jeune Elio di Stefano nous entraîne dans les secrets et les aspirations de tout un peuple tiraillé entre l'asservissement et la soif d'assumer enfin sa spécificité. Les siciliens se sont laissés conquérir pendant de nombreux siècles par des civilisations de tous horizons qui ont laissé des traces sur leur territoire. Un peu de leur sang coule dans leurs veines. Mais un amour brûlant enflamme leur âme et guide leurs émotions impétueuses, un serment scellé depuis la nuit des temps avec leur Créateur pour préservé les richesses de ce jardin d'Eden confié à leurs mains. Berceau et salut de toute vie.

 

Alors, lorsque le futur roi d'Italie envoie Garibaldi pour rallier ce grenier fructueux à son royaume, tous ne se rallient pas à son projet. Le meilleur des fils du royaume des Deux-Sicile émerge et engage une guérilla contre l'Italie en marche, laissant s’engouffrer dans la brèche du conflit l'orgueil blessé des hommes en quête de pouvoir. L'aristocratie en déroute abandonne ses terres à de farouches personnages, des fermiers avides de revanche sur leurs propriétaires lointains et absents. Mais les plus courageux d'entre eux, que la noblesse de titre rejoint la noblesse d'âme, s'engagent à protéger leurs ouvriers et paysans face aux menaces des premières mafias et à la catastrophe économique qu'ils entrevoient. 

En suivant le fils de l'un d'eux, Elio, nous quittons les confortables demeures palermitaines pour conquérir le maquis au cœur de la campagne et des montagnes qui bordent le littoral de l'île principale de la Trinacria, à la recherche de l'âme du jardin des dieux... 

 

Et vous, quel camp choisirez-vous ? 

 

 #roman #romanhistorique #Sicile 

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